La révolution numérique bouscule le système économique des rédactions. Elles doivent s’adapter aux usages des nouveaux lecteurs, sans pour autant chambouler les habitudes de leur public actuel. Naviguant entre deux eaux, il leurs faut réagir au plus vite. Le Groupe Centre France opte pour la création d’une cellule de recherche : le LAB.
Au troisième étage du siège de La Montagne Centre France, titre de presse quotidienne local en Auvergne, opèrent Raphaël Poughon et Quentin Jaud. Au beau milieu du bâtiment neuf, entre sièges en cuirs et locaux de haut standing, se cache un open space un peu particulier. Bien différente des salles de rédactions habituelles, la cellule du LAB s’inspire des coworking fleurissant partout en France depuis une dizaine d’années.
Un espace chaleureux, aménagé façon salon cocooning, pour se sentir comme à la maison. Canapé, table bar, bibliothèque, ordinateurs et café à disposition, veulent instaurer détente et créativité. Dans cet open space de corpoworking, une pièce symbolise le management collaboratif : le bocal. Réunion sur canapé et mur vitré inspirent confiance et transparence. Bien loin des entretiens hiérarchiques, le LAB modernise les conférences de rédactions en amenant imagination et créativité.
Accompagner, diversifier, accélérer
Créé en 2014, cette cellule de recherche a pour mission principale d’accompagner tous les titres de presse détenus par le Groupe Centre France dans leur mutation numérique. Raphaël Poughon et Quentin Jaud tout deux journalistes sont les chercheurs du LAB. D’abord orientés sur de la veille d’informations, ces deux comparses explorent les nouveaux outils numériques et leurs utilisations des usagers.
Cette phase de recherche s’accompagne d’une aide dans les rédactions pour travailler sur les nouveaux formats numériques. Le groupe de presse veut coller aux usages changeants de la lecture de l’information. Ils expérimentent des outils concrets tels que “Mon journal en campagne”, pour être toujours au plus près des lecteurs et lectrices; ou encore l’utilisation du dessin pour rapporter les procès. Ce sont de nombreux essais avec certaines réussites et aussi des échecs, admet Raphaël.
American dream
Le système se veut rapide et efficace. Il se fonde sur la manière de faire, l’expérience et l’accélération. Dans le même moule qu’une startup de la Silicon Valley, le LAB opte pour la prise de risque. Il gomme la hiérarchie pour un travail horizontal. Le rapport d’autorité laisse place à un travail collectif, en collaboration avec toutes les équipes du groupe, pas seulement les journalistes. Toujours dans un élan de management participatif, il met en avant la bienveillance et la souplesse dans ses actions.
Raphaël et Quentin ne travaillent pas seuls sur la transition numérique du groupe. Ils vont constamment trouver conseils dans les espaces de coworking, des incubateurs et accélérateurs en innovation numérique. Leur collaboration s’étend au-delà des journalistes. Développeurs, spécialistes de la data (données) et designers web sont des personnes ressources dans la transition numérique de la rédaction. Le Bivouac, accélérateur de startups numériques, est un des partenaires du LAB. Ils collaborent pour trouver ensemble des outils à l’évolution numérique des rédactions.
Le LAB est aussi moteur et porteur de projets autour de cette transition numérique. Des initiatives font naître des journées dédiées à la collaboration de tous les acteurs numériques. Un journocamp a été organisé fin 2017 au pied des volcans d’Auvergne. Le thème principal de celui-ci, le data journalisme. Apparu avec le numérique, il met en avant la traduction des données par des schémas et cartes interactives. L’occasion d’échanger sur ces usages numériques et d’être plus fort ensemble sur l’utilisation des données.
Dernièrement le LAB a orchestré dans ses locaux, un Médiackaton. 48h sous le symbole de l’innovation, où se rencontraient journalistes, graphistes, codeurs, développeurs et professionnels de la data. Tous mis au défi de réinventer l’information locale. Cinq projets ont émergés de ces deux jours, jusqu’à l’élaboration du prototype. Ils s’inscrivent dans le travail d’expérience du LAB et sur les nouveaux métiers. Le groupe identifie ainsi les profils atypiques pour de possibles embauches.
Diversifier pour mieux s’adapter
Ces manifestations sont le reflet d’un projet bien réfléchis par le Groupe Centre France. D’ici 2019, le LAB s’étendra pour accueillir un premier incubateur. Il sera orienté sur les nouveaux médias indépendants ou les startups de solutions de services aux médias. L’occasion d’ouvrir les rédactions à de nouvelles initiatives. Le groupe soutiendra les projets et les accompagnera. A la clef, un double enjeu, les startups bénéficieront de l’influence de Centre France. Ce dernier se verra potentiellement entrer dans les capitaux de ces startups prometteuses.
En attendant, Quentin et Raphaël travaillent activement dans la recherche de partenaires et de potentiels projets naissants. Ils partagent aussi leurs travaux sur un site ouvert à tous : les agités du local. Ils y expliquent leurs recherches sur le numérique. Une nouvelle opportunité d’échanger avec leurs confrères sur leurs démarches.
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